DIMITRI FROM PARIS

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Découvrez les débuts du DJ français le plus demandé et apprécié actuellement aux USA à travers un extrait de l'article concocté par Guido MINISKY pour le magazine DJmix de février 2002.

Un grand merci à Guido M. pour l'autorisation de diffusion.

Dimitri from Paris... to New York
(DJmix #6 / février 2002)

A 38 ans, Dimitri est sûrement le plus prolifique Français en activité. Radio, remixes, DJing, musique, le bonhomme a touché à tout, avec bonheur et jamais à moitié.




Radio-DIM

Dim grandit rive gauche, ado du Xlllè. «J'étais un élève qui ne la ramenait pas, ni bon ni mauvais, je ne voulais pas me faire remarquer. Mes parents estimaient que la télé, c'était pas pour nous. J'ai pleuré pour l'avoir, j'ai gagné et j'ai découvert les séries télé ! Mission Impossible" était le top, juste milieu entre mes deux passions, James Bond et les bandes-annonce.»
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Le générique de fin lui amène sur un plateau la révélation de sa
vie : «A la maison, ma mère n'écoutait que du free jazz chelou arythmique qui me faisait peur, mon père que du classique très baroque, pas énergique à la Mozart. A I'époque Mozart c'était Stallone et Bach, Truffaut. Grâce au générique de fin de "Mission Impossible", j'ai découvert la musique avec des beats.»

Son premier disque, une compil des B.O. de John Barry. Tous les trois mois, il en achète un nouveau et l'écoute jusqu'à l'usure. Et naturellement, devient radiophile. «RTL, comparé au France-Musique de mon père, c'était génial, ça vivait !» Imitations a l'appui. Un animateur notoire de I'époque, Bernard Schu, tient lieu de héros «C'est notre ancêtre a tous, le précurseur des shows radios dance. Il avait le Hit des Clubs sur RTL tous les samedis soirs (je savais pas trop ce que c'était les clubs à ce moment-là). II jouait funky/disco, mixait très bien, du moins je trouvais à l'époque, c'était gavé de jingles dans tous les sens, de dialogues piqués dans des films, déjà. Ca nous changeait de Téléphone et de la variété de l'époque. II a été l'un des premiers à parler du SIDA. Aujourd'hui, la musique des clubs n'est pas si éloignée de la musique qui passe habituellement à la radio.»

Le tout jeune Dimitri compile Schu sur des cassettes. Mais un duo d'animateurs encore plus balèzes va le terrasser : Smith & Wesson sur Radio 7. «Ce sont les DJs de I'espace», ils mixent a tout va et parlent dans des Vocoders. Les radios libres jouent "Rapper's Delight" («Y'avait même pas de mot pour décrire ce style de musique»), et un reportage d'Actuel sur New York fait basculer Dimitri dans le hip hop, il achète les compils, les maxis... Le beat du rap d'alors est disco, les samplers n'existent pas et personne ne sait ce que fait le type avec les tourne-disques derrière les chanteurs. Jusqu'à la première tournée Zulu Nation a Paris, au Pavillon Baltard: «Le mec avec les platines est la, devant moi, et il n'y a pas de musicien... (ton mystérieux:) "Mais qu'est-ce qui se passe ici ?" Au fur et à mesure du concert, je comprends et découvre le scratch. J'ai une platine chez moi depuis vingt ans, et d'un seul coup je réalise qu'on peut faire autre chose avec qu'écouter un disque. C'était comme si j'apprenais qu'on pouvait regarder la télé avec le four. Le DJ est DST, un des trois tueurs de l'époque, le scratcheur de "Rock It". Je rentre à la maison, et direct je prends un disque pour essayer. Tous les soirs je m'entraîne, je savais même pas qu'il y avait une histoire, une culture... Puis je découvre le passe-passe, embarque la platine du salon dans ma chambre pour m'y mettre, me fabrique une table de mixage avec deux faders... J'ai mixé longtemps avec avant d'avoir les 500 balles pour m'en payer une vraie.
Plus tard, je décèle tout seul chez moi la notion même de mixage en changeant la vitesse du disque avec le pitch, qui est là normalement pour les variations de courant. Je me fais mes premières cassettes. Fascine par un reedit maison de "Billie Jean" sur Radio 7, je m'y mets et j'en envoie quelques uns à Radio 7. Ils en diffusent, ça m'encourage.»
Grâce a un pote, il peut visiter les studios d'Europe 1. Il y rencontre "MC" Adrian Johnson qui le branche sur CFM, la station FM d'Europe 1, ancêtre d'Europe 2. «Il me dit "Tu fais le musique? Fais-moi écouter. Mmmh, c'est bien, comme à New York, tu as le bon vibe." Lui en revanche ne sait pas du tout mixer. Mais il passe mes edits à l'antenne.»

Ce qui vaut à Dimitri d'être remarqué par Robert Levy-Provençal (aujourd'hui RLP sur FG). «On l'appelle alors Scratcheur-Fou. C'est le premier DJ à l'américaine, il mixe des heures sans jingle ni voix, sur RFM (la radio libre où on peut écouter Coluche) et sur Radio 7.» RLP commande à Dim un réédit par semaine. C'est rudimentaire, Dim travaille toujours sur cassette et flingue les touches 'pause' les unes après les autres. Un premier boulot passionnant au C.E. d'Europe Assistance lui permet de se payer un magneto deux pistes a bande. «Ca change ma vie. D'un seul coup, je passe semi-pro.» Le genre même du reedit devient un art, l'electro s'ouvrant aux premières expérimentations de mecs comme Arthur Baker. «On commence à entendre des sons répétés des milliards de fois dans un morceau. Le montage, c'était comme du dessin animé image par image, tu pouvais décomposer à l'infini. Aujourd'hui, avec le matos informatique, ça fait rire. A l'époque, c'était vraiment long. "Copier-coller", c'était à la main. Il y avait le passage de bravoure, ou il fallait montrer son savoir-faire. C'etait la pétarade, le solo d'edit ! Ca me prenait la semaine entière pour cracher un morceau.»
La compensation vient au bout d'un an : «RLP m'emmène avec Dee Nasty au New Music Seminar de NY, organisé par Tom Silvermann (Tommy Boy). Point par point l'ancêtre de Miami, plus des lives. J'y ai vu Trouble Funk, ESG, Deee Lite...» C'est la claque. NY, les soirées, la rencontre d'autres passionnés du beat, les conférences ("Comment faire un remix" par Arthur Baker), les disques gratos! Le rêve absolu de Dim alors est d'être remixeur comme ses héros Baker, Kevorkian, Latin Rascals... «DJ, ça voulait rien dire, c'etait un pauvre truc, rien! Ou alors c'était scratcheur, mais quand j'ai vu Cash Money, Dee Nasty et les autres dans les premières compètes de DJ, j'ai lâché.» De retour à Paris, gonflé a bloc, Dimitri enregistre des maquettes dans les studios d'Europe 1 et part les présenter à l'ex-La voix du lézard. Ca donnera Skydance, deux soirs par semaine où il mixe sans discontinuer, plus de petits boulots de montage... avant d'être rapidement débauché par NRJ qui lui offre le plan de ses rêves : le hit des clubs.
Pendant ce temps-la, la 5 s'installe dans les télés françaises avec son armée de séries ricaines ringardes. Ces séries que Dimitri enregistre désormais frénétiquement, en quête de phrases débiles à voler pour les jingles du NRJ Club (le fameux «Joli travail Dimitri» en provient).
(Copyright 2002 - DJmix - Tous droits réservés)

Propos recueillis par Guido MINISKY pour le magazine DJmix de février 2002.



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